Le domaine des Pothiers
"La beauté du détail"
En quittant le Beaujolais, nous avons fait un détour par la Côte-roannaise pour aller à la rencontre de Romain Paire, vigneron au domaine des Pothiers depuis plus de quinze ans.
Précision importante : la Côte-Roannaise fait partie de la région viticole de la Loire !
Le domaine fait 22 hectares de vignes avec une partie en polyculture et un élevage de vaches.
Tout ce joli monde élevé ou cultivé en biodynamie.
Le Gamay Saint-Romain est le cépage emblématique, historique et autochtone de la Côte-Roannaise, car il vient d’un petit village nommé Saint-Romain-la-Motte, situé à une dizaine de kilomètres du domaine des Pothiers.
Il produit de petites baies qui favorisent la concentration en cuve (rapport important entre la quantité de jus et les pellicules du raisin), et se démarque par un profil épicé et poivré.
Le cépage représente 19 des 22 hectares plantés au domaine, mais Romain produit également du blanc avec du Chardonnay, du Pinot Gris et un peu de Riesling planté récemment.
Chez Romain, la biodynamie n’est pas seulement une philosophie et une méthode de travail, c’est aussi une réelle beauté pour les yeux.
Nous n’avions jamais vu de si jolis enherbements de vignes.
Tous les deux rangs, Romain plante un savant mélange de fleurs, de céréales et autres semences, afin de créer un cocktail végétal aux mille vertus pour ses vignes : structuration du sol grâce aux racines, captage d’azote, matières organiques, insectes, biodiversité etc.
Le mélange change tous les ans pour ne pas qu’une plante prenne le dessus, et cette année à la carte vous pouviez trouver dans les vignes de Romain : seigle, triticale, trèfle incarnat, pois, vesce, phacélie, sainfoin, navette, radis chinois ! ... J'ai faim !
En terme de sols, la Côte-Roannaise est uniquement constituée de granits. Il en existe néanmoins une très grande diversité (rhyolites, dacites, sables, brut). C’est d'ailleurs en fonction de la position de ces granits sur les coteaux que l’on pourra trouver des zones un peu plus argileuses, pour les blancs notamment.
Le domaine vinifie une douzaine de cuvées, avec un accent mis sur la qualité de la matière première qu’est le fruit. Les vendangeurs réalisent une première sélection qui continue sur la table de tri, afin de n’utiliser pour le vin que les plus beaux raisins.
En fonction du millésime, Romain choisit d’égrapper ou non, même si le plus souvent il réalise des assemblages, afin d’obtenir l’équilibre souhaité dans ses vins.
Pour rappel, la rafle est la partie végétale (tige) sur laquelle les grains de raisin sont accrochés.
Les vignerons ont le choix soit d’érafler (de n’utiliser que les grains), soit d’utiliser les grappes entières (avec rafle), ou soit de mélanger grappes entières et raisins éraflés.
L’intérêt de garder ou non la rafle relève de la direction souhaitée par le vigneron. Cela jouera sur les tanins, la complexité, la fraicheur et l’aromatique du vin.
Une fois en cuve, les macérations au domaine des Pothiers sont assez longues, jusqu’à trois semaines parfois mais avec peu d’extraction (donc peu de remontages). C’est véritablement l’infusion et la durée de fermentation qui sont recherchées par Romain. Il obtient ainsi des vins avec bien plus de finesse.
En 2011, la cuverie a été complètement repensée, agrandie et axée sur les gros contenants de béton et de bois. L'esprit était à l’oxygénation ménagée sur les élevages. Les fûts ont quasiment tous une forme tronconique, favorisant ainsi l’échange entre jus et raisin (les baies flottent un peu moins au-dessus de la cuve et sont donc plus en contact avec leur jus).
Enfin, tous les échanges et les transferts se font uniquement par gravité, une façon de préserver au maximum le vin de l’oxydation et de la trituration, toujours dans le but d’obtenir de belles baies entières dans les cuves, et de réduire au maximum les interventions par la suite.
Parmi toutes les cuvées de Romain, La Chapelle et Diogène ont attiré notre attention.
La Chapelle est une cuvée d’altitude (520 mètres), sur granit vert (dacite), très ventée, et sur des terroirs qui donnent des vins tout en finesse, avec beaucoup de longueur, sans lourdeur, à l'aromatique florale et épicée.
Diogène quant à elle, est issue de parcelles en milieu de coteau (450 mètres), dont les raisins sont totalement égrappés et élevés en amphores pour atténuer quelque peu le côté tannique du vin, qui, dès le début de la vinification, présente déjà beaucoup de matière.
Ces 2 cuvées sont d’une très grande polyvalence, et se gardent sans problème une dizaine d’années.
C’est incroyable de voir à quel point Romain Paire pense à tout.
De la forme des cuves, aux céréales et fleurs dans les rangs de vignes, à l’égrappage, à la gravité, à la lune, en passant par le compost-maison (grâce aux vaches !), et aux macérations, on sent que ce vigneron est non seulement un très grand passionné, mais aussi à quel point il ne fait qu’un avec son domaine.
Il y connaît chaque centimètre carré, produisant ainsi les vins qu’il souhaite, en harmonie avec la nature, et révélant au mieux le sublime terroir de la Côte-Roannaise.
